Plutôt qu’un roman, une saisissante galerie de portraits. Des portraits-charge, à vrai dire, déployés avec un style vif et drôle comme autant de saillies contre le véganisme, la beaufitude ambiante ou l’inanité politique de nos démocrates décentrés. En 27 trajectoires, Antoine Jaccoud met à nu nos petites faiblesses, nos grandes illusions, avec un sens du détail et du cocasse qui fait sourire puis réfléchir.
C’est que le dramaturge lausannois a le sens de la mise en scène, et l’on se régale notamment de ces Country monologues dépeignant le rêve américain échoué en terres valaisannes, où le Stetson remplace la casquette Isostar, où le chœur mixte fait place à la danse en ligne en chemises à carreaux et top à franges. On le croit anecdotique, il est sociologique – s’il fait bref, c’est bien souvent pour en dire long. Acerbe, acide, tragique et musclé, Jaccoud fait écho aux désenchantements de notre Suisse contemporaine avec un humour ravageur. Oui, autant en rire.

Thierry Raboud