Joseph Incardona excelle dans l’art de raconter. Auteur de romans rocks et noirs, il narre dans Permis C, ce sésame tant convoité, prometteur d’une réelle intégration, une année de l’enfance d’André Pastrella, son alter ego, ou peut-être SA dernière année d’enfance.
Fils d’un père italien et d’une mère suisse venus s’installer à Genève, il fait l’objet, dès son entrée en classe de la haine et de la méchanceté d’une bande, de l’incompréhension de l’institutrice, et de la sévérité de ses parents. L’Italie et la famille sicilienne visitée lors d’un retour au pays pendant l’été, est une véritable bouffée d’air.
Bien des écrits relatent déjà ces intégrations difficiles de travailleurs italiens ou espagnols des années 70. Mais Joseph Incardona ne tombe pas dans le piège de raconter le destin d’un souffre-douleur. Pas de complaisance, pas de pathos, pas de cliché. Juste l’histoire d’un enfant qui doit se faire accepter malgré un père à l’orgueil mal placé, une mère anxieuse et le désir de les satisfaire tous les deux. Il pourrait être Suisse venant d’un autre canton, d’une autre région linguistique, ou encore d’un autre pays. Et c’est en cela que Permis C est réussi, il parle à tous ceux qui ont dû ou doivent faire face à une intégration.
Je le répète Joseph Incardona est un conteur, son texte, relevé d’une écriture qui vous prend et qui vous accompagne jusqu’au bout, tel un voyage en voiture Genève – Messine, avec les douaniers suspicieux, les rivalités sur la route, le passage à bord du ferry, les retrouvailles avec les grands-parents et les escapades dans le maquis sicilien.
Un temps qui se renouvelle à l’infini.

Véronique Rossier