Grâce à une histoire simple et touchante, Xochitl Borel propose dans L’Alphabet des anges une fable dont la forme et l’enjeu sont poétiques. Soledad possède un avenir tout tracé. Jusqu’au moment où elle tombe amoureuse et enceinte. Pour « arranger les choses », le père de la jeune fille organise un rendez-vous avec une faiseuse d’ange, chez qui elle se rend accompagnée de sa belle-mère, une belle-mère de dix ans son aînée, avec qui elle peine à communiquer. En fait, les personnages se côtoient sans se comprendre. Soledad, elle, aurait souhaité garder l’enfant. Pour son plus grand bonheur, le bébé survit. Aneth est différente. Borgne, elle porte dans son corps le souvenir de la tentative d’avortement. Et pourtant, elle voit mieux et plus loin que les autres : ses perceptions, sensations et abstractions sont poésie.
Un réseau de correspondances se tisse – se tricote, pour reprendre une métaphore récurrente du texte – entre couleurs, règne végétal, souvenirs et expériences. Les sonorités des mots mais aussi les silences, l’écrit, les gestes, bref, le langage dans sa plus large acception permettent d’appréhender le monde et la relation à autrui de manière singulière.
La poésie s’élève au rang d’art de vivre, elle est l’occasion pour les personnages de se trouver et de se retrouver.

Ludivine Jaquiery