Alain Bagnoud

Né le 19 mars 1959 à Ollon sur la commune de Chermignon, Alain Bagnoud a obtenu en 1978 sa maturité (option socio-économique) au collège de Sion avant de suivre des études de lettres à l’Université de Genève et de compléter sa formation par des études pédagogiques. Depuis 1987, il enseigne la littérature au niveau secondaire II et vit à Genève.
Dès 1986, Alain Bagnoud rédige des chroniques de spectacles dans le Journal de Genève (jusqu’en 1988), puis des recensions et chroniques littéraires pour Le Nouveau Quotidien de 1991 à 1998. Il collabore également à la presse valaisanne comme chroniqueur et éditorialiste du Journal de Sierre entre 1997 et 2000.
Dès 1987, il s’adonne également à l’écriture littéraire.
Pour le théâtre d’abord : sa première pièce, Canicule, est montée au théâtre Saint-Gervais à Genève en 1987. Suivront entre autres Des ponts si hauts et New York si proche en 1995 à L’Usine (Genève) ; Revue nocturne et corrigée, théatre musical en collaboration avec le musicien Yves Massy, joué au Théâtre du Grütli en 1997 ; La confession présentée à l’Eglise des Jésuites de Sion en 1999 et à la Maison de Courten à Sierre en 2000.
Comme romancier ensuite : en 1989, il publie en collaboration avec Jean Winiger Les épanchements indélicats, un roman épistolaire. Deux ans plus tard paraît L’oeil du crapaud puis, en 1993, Commérages autour d’une passion. La même année, il reçoit le Prix d’encouragement de l’Etat du Valais. Fidèle aux éditions de l’Aire, Alain Bagnoud publie depuis régulièrement des romans. En 2008, avec La leçon de choses en un jour, il s’engage dans l’écriture d’une trilogie basée sur son vécu. Le deuxième volet, Le jour du dragon, paraît la même année suivi en 2010 de Le blues des vocations éphémères. Son dernier ouvrage, Transports, est paru en 2011.
Depuis ses débuts, Alain Bagnoud collabore régulièrement à des revues littéraires : La Revue des Belles Lettres (Genève), [vwa] (La Chaux-de-Fonds), D’autre Part(Delémont), Litteraria Pragensia (Prague), Magyar Naplò (Budapest), Cahiers de l’Association valaisanne des écrivains, etc.

(source : wikivalais.ch)

livre(s) sélectionné(s)

édition 2021-2022

La Vie suprême

paru aux Editions de l’Aire, 2020

Et si le propre de l’être humain, c’était de (se) raconter des histoires et de les transmettre ? Mythes, légendes… privilège de la fiction que d’exploiter des chaînes de causalité pour mieux (se) comprendre. Quelle est la part du vrai ? Quelle est la part d’invention ? Et si « inventer », c’était justement « aller à la rencontre » de la vérité, en comblant les brèches de l’insaisissable par des « trouvailles », révélatrices, comme le suggère l’étymon que l’on entend encore résonner dans cette notion d’« invention » ?

Alain Bagnoud, dans Une Vie suprême, va à la rencontre d’un héros de légende, Joseph-Samuel Farinet, le faux-monnayeur valaisan immortalisé par Ramuz, rêvant de liberté, aidant les plus pauvres à s’émanciper, se riant de la justice. Même la prison de Sion ne l’a pas retenu. Sa légende, Farinet a contribué à la bâtir. Il aimait à raconter ses prouesses, fascinait les gens. Si on retrouve dans le roman d’Alain Bagnoud quelques-uns de ces aspects de la personnalité de Farinet, ce dernier apparaît également comme bien plus humain : enjôleur, manipulateur, égoïste, amateur de femmes (celles des autres). Dans Saint Farinet, en 2005, l’auteur s’était déjà attaché à remettre en question ce Robin des Bois suisse.

Et pourtant, lorsque Stéphane Besse – le héros du roman d’Alain Bagnoud – fait la connaissance de Farinet, une nouvelle vie commence. Il s’attache aux beaux discours du faux-monnayeur, aux potentialités qu’ils offrent. Farinet se dépeint comme un individu prêt à changer le monde pour faire rêver ses compagnons. Et même lorsque, à travers ses actions, il ne correspond pas à la figure idéale qu’il a construite, Besse s’accroche aux histoires. Qu’importe le Farinet « réel », il n’en reste pas moins que cet homme, grâce à ses mots, permet à Besse de trouver « sa vérité » (p. 7).
En effet, Besse « était comme tout le monde, mais avec des rêves. Son but, c’était de faire l’expérience d’une vie suprême, comme il disait. Les choses du réel ne lui convenaient pas, c’était son caractère. Il refusait de se soumettre et d’accepter. » (p. 9) Ces paroles, rapportées au début du roman, sont celles de la petite-fille de Besse, une femme âgée qui transmet une autre légende à sa petite-fille, celle de ce « Grand-papa Besse », pauvre, aspirant à autre chose, séduit par les rêves que Farinet sème dans son esprit.

Nous sommes en 1873, Farinet cherche des associés pour relancer son activité, fabriquer de fausses pièces de 20 centimes. Il circule dans les villages de montagne. Il exige une mise de départ. Besse n’a que lui-même à mettre en jeu, à savoir sa loyauté sans faille. C’est lui qui prendra les plus gros risques, c’est lui qui sera arrêté. Jamais il ne dénoncera personne. Jamais il n’aura de regrets. Il ne pouvait pas en être autrement. Il aura toujours été en accord avec lui-même.
Même lorsque les autres associés de Farinet commencent à en avoir assez des jolies phrases de celui-ci, Besse ressort « toujours plus vivant que lorsqu’il était arrivé » (p. 67), galvanisé, lorsqu’il a l’occasion de l’entendre.

A la fin du roman, Besse écrit depuis sa cellule une lettre à Laurence, une fille de son village qui, comme Farinet, lui a permis d’appréhender la vie différemment : elle, elle lui avait raconté l’Amour. Comment elle était devenue la honte du village parce qu’elle avait aimé, hors mariage. Avant d’entendre sa version des événements, Besse, comme les autres, l’avait jugée, sans réfléchir. Puis, il était venu la nuit, à sa fenêtre. Il l’avait écoutée. C’était à la vérité de l’amour qu’elle l’avait initié. Il n’était pas tombé amoureux d’elle, mais il avait envié la force de ses sentiments, un aspect de la réalité inédit avait été révélé. Derrière son volet, Laurence, quant à elle, avait rencontré en Besse l’oreille attentive et bienveillante qu’elle n’avait pas trouvée au confessionnal, puisque quand elle s’était ouverte de son aventure au curé, elle avait été humiliée, avec violence, alors que sa seule préoccupation avait été de s’assurer que dans l’Autre Vie, elle pût être unie à son amoureux. Inutile de préciser que l’amant n’avait jamais été inquiété.

Dans sa lettre à Laurence, Besse lui propose de l’épouser, car eux deux sont différents, ils pourront être autonomes, ils se comprennent, ils ont appris quelque chose de la vie qui échappe aux autres. Besse évoque son parcours comme une sorte d’initiation.
Une fois sa peine purgée, Besse quittera son village, ira s’établir ailleurs.

Or, Alain Bagnoud, dans son arbre généalogique, a repéré un « Stéphane Besse ». Le nom est peu commun dans son village. Personne ne sait d’où il est venu, ce Besse, comment il est arrivé là. Alain Bagnoud a donc créé « sa vérité », en donnant corps à une partie de la légende familiale.

La Vie suprême revient sur une légende pour la nuancer, révéler ses zones d’ombre – celle de Farinet ; en fabrique une autre – celle de cet aïeul Besse – ; célèbre surtout l’art de raconter des histoires, met en scène la puissance de celles-ci sur ceux qui les entendent, car oui, la dimension orale est fortement présente dans ce roman, en témoigne le dispositif narratif cadre qui, dès les premières lignes, donne le ton.

Ludivine Jaquiery

Edition 2009-2010

Le jour du dragon

paru aux Editions de l’Aire, 2008

Refermé Le Jour du dragon de Alain Bagnoud, on retourne à la 4e de couverture et on mire sa photo en médaillon. Histoire de prolonger ce moment exceptionnel passé avec lui en Valais à revivre les années soixante-dix de son adolescence. Ses petits yeux plissés en permanence vous scannent les humains comme les événements avec une acuité de lynx…
La chronique fait suite au remarqué La Leçon de choses en un jour, qui campait la famille valaisanne et son destin entre plaine et montagne, passé et futur, clans et rivalités bonhommes et enthousiastes. Ici, le progrès évoluant dans un sens aussi exalté que tendu, comme a pu le décrire un Maurice Chappaz, l’adolescent ouvre les yeux sur une réalité plus prosaïque.
L’idéologie fait irruption dans l’univers du narrateur, en même temps que l’amour. Pas facile à gérer, difficile de se situer entre l’atavisme identitaire et l’attrait des promesses de la ville. Et, métaphore magnifique de ces pages ciselées et tellement bien senties : la fanfare, qui demeure le lieu de toutes les rencontres, la mise en abyme de toutes les tensions.
Emouvante, cette évocation impressionniste contient en même temps sa part d’histoire et d’anthropologie. Beaucoup de qualités pour ce Jour du dragon qui marquera sans conteste la littérature suisse romande du genre. Celle, ramuzienne en particulier, de parvenir, partant du terroir, à toucher à l’universel.

Serge Bimpage

les inédits

édition 2021-2022

Rory Gallagher et Emile Ajar

Il y avait deux choses qui m'intéressaient à 17 ans. Trois choses, en fait, plutôt.

Quand j'avais 17 ans
Edition 2009-2010

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« Mes dix-sept ans manquent d'histoire, et dans ma vie, et dans le monde. J'ai consulté des encyclopédies pour raviver ma mémoire : RAS dans l'actualité durable. »

Quand j'avais 17 ans